Avec plus de deux millions de non-nationaux, la Suisse est l’un des pays au monde où la proportion d’étrangers est la plus élevée (24,9% en 2016). Mais, la majorité d’entre eux vivent depuis longtemps en Suisse et près d’un cinquième y est né. Il s’agit pour la plupart d’étrangers de deuxième, voire de troisième génération. En outre, 44,4% des résidents étrangers nés en dehors de Suisse vivent depuis au moins dix ans dans notre pays. Ils sont extrêmement bien établis – ils travaillent, paient leurs impôts et participent à la vie sociale. Malgré cela, ce quart de la population résidente reste aujourd’hui exclue de tout un pan d’activités communautaires et politiques.
Participation à travers le service citoyen
Vecteur de cohésion sociale, le service citoyen universel représenterait un formidable outil d’intégration. Dans cette optique, Avenir Suisse propose d’inclure également les étrangers résidents permanents titulaires d’un permis C (autorisation d’établissement) dans ce nouveau service. En 2016, leur nombre s’élevait à 1 297 244 personnes, dont 931 618 âgés entre 20 et 70 ans, selon l’Office fédéral de la statistique (OFS ). Pour intégrer ce nombre important de miliciens potentiels, la mise en place du service citoyen s’effectuerait de manière progressive. Cela s’accomplirait en définissant une génération de transition. Dans un premier temps, les titulaires d’un permis C effectueraient cinq jours par an au service de la communauté. Les plus jeunes auraient dès 20 ans la possibilité d’accomplir leur service citoyen.
L’argument sous-jacent à l’inclusion des étrangers dans le service citoyen est de leur permettre de participer davantage à la vie communautaire et de renforcer les échanges avec la population helvétique. Pour que cet engagement ait du sens, l’établissement en Suisse et un attachement suffisant au pays constituent des critères indispensables. Les titulaires d’un permis C remplissent ces conditions. En revanche, les titulaires de permis B (validité de 5 ans), L (activité de moins d’un an) ou G (permis pour frontalier), les demandeurs d’asile ou les réfugiés ne pourraient pas accéder au service citoyen ; car leur lien avec la Suisse risquerait de ne pas être suffisamment fort et durable.
Différents domaines d’activités
Dans le cadre du système de milice, les étrangers résidents permanents pourraient être actifs dans deux secteurs principaux : les activités actuellement couvertes par le service civil et les services à la communauté, tels que décrits dans le tableau de l’article Les principaux contours d’un service citoyen universel. L’engagement de ces nouveaux miliciens pourrait notamment prendre la forme d’un soutien à des clubs sportifs, associations etc. ou encore l’accompagnement de personnes âgées. En revanche, ils n’auraient pas accès aux tâches liées à la défense nationale (service militaire).
Octroi de droits politiques au niveau local
En complément de l’extension de l’obligation de servir, l’attribution de certains droits politiques aux étrangers établis devrait être envisagée. Leur exclusion complète de la sphère politique va en effet à l’encontre du principe «No taxation without representation». A l’heure actuelle, seuls six cantons (VD, FR, NE, JU, AR, GR) accordent des droits politiques aux étrangers au niveau local ; le canton de Genève leur a octroyé uniquement le droit de vote, mais pas celui d’éligibilité. En parallèle à l’obligation de participer au service citoyen, il serait cohérent de conférer aux titulaires d’un permis C la possibilité de voter, d’élire et d’être élu à l’échelon communal. Les cantons devraient bien sûr pouvoir décider individuellement s’ils souhaitent ou non octroyer ces droits au niveau communal et selon quels critères.
Un service compatible avec le droit international
Certaines voix critiques invoquent l’article 4, alinéa 2 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et assimilent le service citoyen universel à du travail forcé. La CEDH stipule néanmoins que «tout service de caractère militaire» (al. 3b) ainsi que les «obligations civiques normales» (al. 3c) constituent des exceptions. Dans le cas des titulaires d’un permis C, le service citoyen en tant que service à la communauté, s’apparente à l’accomplissement d’un devoir envers la société. Ce dernier n’est d’aucune commune mesure avec de l’esclavage ou du travail forcé faisant l’objet de l’article 4. Envisager d’étendre les droits pour les résidents étrangers, parallèlement aux devoirs dans le cadre d’un service citoyens renforce cet argument. Ces nouvelles possibilités constitueraient ainsi davantage un gain qu’une nouvelle obligation pour les étrangers résidents permanents.
Cet article fait partie de notre série d’articles thématiques intitulée «Vers un service citoyen». Avenir Suisse y aborde la question de l’engagement milicien dans l’Etat et de la mise en place d’un service citoyen. Chaque semaine, un nouvel article sera publié sur notre site web.